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Je n’aime pas la Réalité Virtuelle

Et qu’importe le succès commercial attendu pour ces casques de réalité virtuelle promis à un avenir radieux si l’on en croit le nombreux sans cesse grandissant de constructeurs sur les rangs : Sony, Google, Facebook, Samsung, HTC, LG et j’en passe.
Je n’aime pas la Réalité Virtuelle

Non, je n'aime pas la Réalité Virtuelle.


Et qu’importe le succès commercial attendu pour ces casques de réalité virtuelle promis à un avenir radieux si l’on en croit le nombre sans cesse grandissant de constructeurs sur les rangs : Sony, Google, Facebook, Samsung, HTC, LG, McDo et Coca Cola, et j’en passe. Les médias suivent le doigt. La VR, c’est le “turfu” nous hurle-t-on à longueur d’articles. Jeu vidéo, tourisme, immobilier, travail… Cette fois-ci c’est sûr, cette réalité virtuelle là n’est pas un gadget, elle touchera tous les secteurs d’activités. Et puis, la preuve, elle ne fait plus vomir (tout le monde). Alors, on ne vous l’avait pas dit ? Mais frivolité ou game changer, peu importe finalement, je n’aime toujours pas la réalité virtuelle.

A mes yeux, elle est le symbole d’un enfermement à la rare perversité. Ces casques qui mystifient la vue et déjouent les tympans m’évoquent toujours Yves Montand dans le film “L'aveu” de Costa-Gavras. On y suit la longue torture d’un vice-ministre des Affaires étrangères dans le Prague des années 50. Victime des purges staliniennes malgré un passé irréprochable, la police politique veut lui faire avouer des crimes qu'il n'a pas commis. La première des tortures est de faire perdre à cet homme non seulement sa dignité mais tout repère concernant le jour et la nuit et sa perception du temps.



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La réalité virtuelle est plus perverse encore car ses utilisateurs ne sont pas kidnappés comme Anton Ludvik. Ils sont volontaires. Leur but : flirter avec des situations qu’ils n’ont pas vécu comme Montand avouait des actes qu’il n’avait pas commis. Si l'ordinateur, et plus encore le smartphone, sont devenus au fil du temps la bicyclette de l'esprit, la réalité virtuelle sera sans doute sa roue pour rongeurs. Il y a quelques jours, au salon Mobile World Congress de Barcelone, la grande messe du mobile, une photo a fait le tour du monde, à juste titre. Creepy, pour le moins.


A la fin de la conférence de presse de Samsung et dans une salle pleine à craquer, le patron de Facebook fait une apparition surprise très remarquée. Mais pas par la salle, du moins, pas tout de suite. Car l’audience, composée essentiellement de journalistes, porte à ce moment là un casque de réalité virtuelle. En clair, ils voient ce que leurs écrans projettent mais pas ce qui se passe réellement autour d'eux. Et donc, casque sur le nez, ils ne voient pas arriver Mark Zuckerberg en jean, t-shirt gris sans casque trop sympa, kikoolol.

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Le cliché est désormais culte. Pourquoi ? Comme toutes les photos historiques, elle n’a nul besoin de légende. Le berger et ses moutons, le Pape et ses évêques, le joueur de flûte et ses rongeurs, encore eux. Le cliché ne remettra pas en cause la foi des adeptes, ils sont sûr d’eux et trop nombreux, mais l’allégorie de la caverne platonicienne prend ici un coup de jeune : un leader du numérique dans la lumière du réel montrant la voie à une bergerie d’usagers immobiles, obnubilés par l’ombre de réalité virtuelle. D’autres images comme celle du Big Brother d'Orwell dans le roman “1984” ou d’une humanité prisonnière de la “Matrix” ne tardent pas à surgir dans la seconde. L’immersion n’est pas un humanisme, tout au plus une prison dorée chère et lourde à porter.


Pour le moment.



Que l’on se comprenne bien : la technologie VR est fantastique et aura toute sa place comme numéro de fête foraine ou pour échapper à un quotidien gris et solitaire après le combo bière/joint. Mais dans le salon familial, quel parent disposera un tel casque devant les yeux de son enfant ? 


Jean Zeid