Son of Zorn : quand Conan rencontre Les Maîtres de l'Univers

Dans la série Son of Zorn (FOX) produite par Phil Lord et Chris Miller (réalisateur du prochain spin-off Star Wars sur Han Solo), un guerrier légendaire revient en Californie après dix ans d’absence avec l’intention de regagner l’affection de son fils adolescent et de reconquérir son ex-femme. Il se trouve que le soldat est Zorn, grand défenseur de l’île Zaphyria et bourreau du sombre Gardien de Girth.

Son of Zorn est une comédie hybride, qui mélange animation et live action, où un héros barbare prénommé Zorn (Jason Sudeikis) originaire d’un pays lointain – un dessin animé des années 80 – essaie de renouer des liens avec sa famille, celle-ci désespérée par les absurdités de cette caricature humoristique et désireuse de vivre dans le monde réel. Après avoir affronté des armées et des hordes sauvages, Zorn doit faire face à la banalité d’une banlieue californienne, dans l’espoir de trouver de l’excitation en dehors de son travail ennuyeux et de son appartement miteux.

Avant que les super-héros ne dominent aujourd’hui le box-office, les héros des samedis matin des années 80 étaient une culture éclectique composée de robots Transformers, d’exterminateurs de fantômes en cols bleus et de guerriers armés jusqu’aux dents venus de lointains royaumes. Les Maîtres de l’Univers et Cosmocats, sont de loin les dessins animés les plus influents de l’époque, mais qu’est-ce qui a influencé ce genre composé d’épées et de sorcellerie ?

Ces fantasmes héroïques aux guerriers robustes sont présents depuis des siècles. Les Grecs avaient Achille, Jason et Persée et bien évidemment l’Odyssée d’Homère. Les Scandinaves avaient aussi leurs héros comme Thor, les Japonais avaient Jiraiya, tandis que les Anglais ont eu le puissant guerrier goth Beowulf.

Ces précurseurs des super-héros d’aujourd’hui ont préparé le terrain pour les personnages de fiction comme John Carter of Mars et Tarzan d’Edgar Rice Burroughs, ou encore Conan le Barbare de Robert E. Howard. Ces aventuriers et combattants, imprimés sur papier lisse, souvent accompagnés d’une jeune fille et d’une épée imposante, définissent la masculinité et l’héroïsme d’une époque qui, pour le meilleur ou pour le pire, font écho dans les bandes dessinées d’aujourd’hui et autres fictions populaires.

Le guerrier que nous reconnaissons en Zorn peut être Conan le Cimmérien de Robert E. Howard, qui a fait ses débuts dans le magazine Weird Tales en décembre 1932. Conan vit à l’âge fictif hyborien et à ses débuts son apparence était athlétique. Mais au fil du temps, les artistes ont aimé dessiner Conan dans des pagnes avec un corps très musclé et sans poils, exagérant son côté sauvage. Comme en témoigne la série Son of Zorn, qui représente Zorn d’une manière presque identique. Depuis des décennies, cette image colle à la peau de ces héros similaires.

Cependant, Conan a continué de façon involontaire à définir la fantaisie dans les années 80 avec Conan le Barbare de John Milius (1982), dans laquelle Arnold Schwarzenegger mettait en valeur – ou pas – le héros pulp de Robert E. Howard. Jason Momoa l’a aussi fait – enfin essayé – dans un déplorable reboot éponyme sorti en 2011.

La même année que la sortie du film de Milius, Mattel a lancé leur nouvelle franchise de jouets Les Maîtres de l’Univers, qui portait beaucoup de similitudes avec Conan (mais avec plus de couleurs et d’éléments surnaturels), conduisant les deux sociétés, celle détenant les droits du héros d’Howard et Mattel, devant les tribunaux en 1984. C’est Mattel qui est sorti victorieux de ce combat.

Pour vendre les jouets, Mattel s’est associé à Filmation en 1983 pour la production d’un dessin animé (composé de 130 épisodes de 30 minutes) servant de support promotionnel et diffusé en syndication (pratique qui consiste à vendre à plusieurs diffuseurs le droit de reproduire un contenu ou de diffuser un programme) entre septembre 1983 et décembre 1984. Le dessin animé, qui fut un carton dans les eighties aux côtés de Voltron et Les Tortues Ninja, est devenu culte, bien que sa nostalgie résonne davantage avec la Génération X qu’avec les millennials.

He-Man fait sans aucun doute partie de l’enfance de Reed Agnew et Eli Journe. Les créateurs de Son of Zorn (également auteurs de la série FX Wilfred) ont probablement grandi avec ces dessins animés des années 80, dont Cosmocats (Thundercats en V.O.). Cette série d’animation diffusée entre 1985 et 1989 suit une race de félins anthropomorphes. Ces derniers avec Starlion sont chassés de leur planète Thundera par Les Mutants. Et doivent maintenant se battre contre un nouvel ennemi redoutable : Mumm-Ra. Cosmocats était plus une série de science-fiction que fantasy, mais son héros, Starlion, reste important pour les enfants ayant grandi dans les années 80.

Ce n’est donc pas une coïncidence si la ressemblance entre Starlion et Zorn est frappante, peut-être même plus que Conan et He-Man. Avec sa crinière rousse, son unique insigne à la ceinture et son épée bien-aimée, Zorn est un mix des vestiges animés des années 80 comme si Starlion et He-Man s’étaient retrouvés dans un blender dosé avec cet humour que nous avions pu découvrir avant l’ère Cartoon Network des 90’s.

Peu importe ses influences, Son of Zorn a l’intention de tracer sa propre route, indépendamment de ce qu’on put apporter Robert E. Howard et Edgar Rice Burroughs. Après tout, Zorn est un barbare. Que va-t-il faire, suivre les règles ?

Conseils lecture :

Tout l’art des maîtres de l’univers disponible aux éditions Huginn & Muninn

Le Guide Howard de Patrice Louinet disponible aux éditions ActuSF

PIERRE SAUVETON