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Michael Cimino est parti, le Grand Cinéma avec lui

Non, ce titre n'est en aucun cas une déclaration alarmante ou l'opinion d'un vieux con persuadé que tout était mieux avant même si bon, parfois, bref. Michael Cimino nous a donc quitté. Il était l'un des derniers Très Grands.
Michael Cimino est parti, le Grand Cinéma avec lui

Non, ce titre n'est en aucun cas une déclaration alarmante ou l'opinion d'un vieux con persuadé que tout était mieux avant même si bon, parfois, bref. Michael Cimino nous a donc quitté. Il était l'un des derniers Très Grands.


Ce sont d'abord les images, les souvenirs qui surgissent. Michael Cimino n'était plus vraiment actif, plus vraiment connu de la jeune génération, et ses chefs-d'oeuvre sont d'une autre époque: la fin des années 70, le début des années 80. Son dernier classique est aussi vieux que moi, il date de 1985 et s'appelle L'Année du Dragon. Alors oui, on repense d'abord à Voyage Au Bout de l'Enfer, et à l'immense La Porte du Paradis. On repense à la scène de la roulette russe. LA scène de la roulette russe, pardon. Celle du mariage, aussi, introduction parfaite à un monument d'horreur. Et puis, il y a les petites anecdotes qui n'ont finalement que peu d'importance: la déroute de United Artists, la fin de ce qu'on appelait Le Nouvel Hollywood. Cimino était depuis longtemps un nom pour les livres d'histoire, une pièce de musée. 


Dans son très bel article paru dans Libé, Jean-Baptiste Thoret, qui a connu le cinéaste, écrit: "Cimino lui-même s’est toujours situé à contre-courant de son temps, tel un retardataire volontaire convaincu que l’écart, le retrait, le pas de côté, constituait la manière la plus juste de saisir le monde : il fut le seul cinéaste de sa génération à aller chercher Clint Eastwood - fraîchement excommunié par Pauline Kael dans les colonnes du New Yorker - pour tourner (et produire) son premier film (le Canardeur). Il préféra faire de son Voyage la tragédie intimiste d’une communauté ouvrière de Pennsylvanie, plutôt qu’un pamphlet anti-guerre de circonstance sur l’engagement catastrophe de l’armée américaine au Vietnam. Et, en 1980, tandis que les télévisions passent en bouclent le manifeste publicitaire du futur président acteur - «It’s morning in America again» - et se préparent cinématographiquement et politiquement à la résurrection en trompe-l’œil de la scène primitive américaine (Baudrillard), Cimino pose ses caméras dans le Wyoming, en quête du moment où les portes du paradis et d’Ellis Island se sont ouvertes sur l’enfer".


Cimino parti, c'est un peu la mort du classicisme d'antan, ou en tout cas de l'idée que l'on pouvait s'en faire, ce qui revient un petit peu au même. C'est une narration, un lyrisme, un souffle qui n'existe plus guère que chez quelques anciens (Spielberg, parfois) et une poignée de nouveaux (Nichols ?). C'est la folie des grandeurs, Hollywood en sépia, la danger sur le plateau, les décideurs passionnés, le visionnaire aux commandes. Cimino aura un peu tué tout cela tout seul en 1985. Il n'est malheureusement plus là pour nous le raconter.


Nico Prat

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