Friends : nous étions le septième membre de la bande
236 épisodes de 22 minutes, soit 5192 minutes. Plus de 86 heures donc, sur dix saisons. Une éternité. Pendant une décennie, nous avons été, un peu, le septième membre de la bande.Texte tiré du livre Les 51 Plus Grands Moments de la Télévision Américaine.
236 épisodes de 22 minutes, soit 5192 minutes. Plus de 86 heures donc, sur dix saisons. Une éternité. Pendant une décennie, nous avons été, un peu, le septième membre de la bande.
Nous avons été amoureux de Phoebe, Rachel étant trop inaccessible. Nous avons détesté Ross, trop énervant, et nettement moins drôle que Joey. Ce n’était pas prévu, mais de simple sitcom, Friends deviendra la série d’une génération. Nous sommes en 1994. Pulp Fiction obtient la Palme d’Or, Forrest Gump devient culte, Claudia Schiffer et David Copperfield officialisent leur (fausse) relation, Johnny et Adeline se marient, tandis que Kurt Cobain nous quitte. 2004: Opportunity se pose sur Mars, Bush est réélu, Arafat s’éteint. Fahrenheit 9/11, le film polémique de Michael Moore, reçoit la Palme d'or, Dig! nous plonge dans la folie d’Anton Newcombe, et Shrek 2 fait mieux que le premier.
Entre ces deux dates, dix années donc. Une éternité pour la télévision, le temps de devenir adulte pour le téléspectateur, de s’extirper de l’enfance, de vivre ses premiers drames, ses premières réussites. Ainsi, nous vivrons des coups de foudre, coups de blues, coups de coeur et coup de reins, et Ross se mariera (encore), Chandler deviendra papa, Phoebe tombera enceinte. Puis, la fin. Et l’ultime phrase, l’ultime café: “On va où ?”, demande Chandler. On se pose également la question, au moment de refermer la porte. Et de voir le temps passé défiler au ralenti.
Thomas Rozec, journaliste chez France Info et animateur du podcast NoCiné: “J’ai un rapport un peu étrange avec Friends. J’ai tellement aimé cette série à l’époque que la revoir me fait un peu de mal. C’est comme ton ex du lycée, à qui tu as offert ton cœur d’adolescent et qui l’a violemment piétiné dès qu’elle en a eu l’occasion. Tu as beau avoir reconstruit ta vie, tu auras toujours le même petit pincement dès que tu penses à elle. Avec Friends, c’est un peu la même chose. Autant te dire que je n’ai pas revu le final de Friends depuis qu’il est passé à la télévision, et que j’en garde un souvenir à la fois flou et brûlant, le mélange doux-amer de toute histoire un peu forte qui se termine. Je préfère ne pas ternir cette sensation en rematant l’épisode qui, j’en suis malheureusement à peu près persuadé, a du très mal vieillir”.
Avoir 15 ans en 2000 était une chose fantastique. Les Strokes n’allaient pas tarder à nous faire découvrir le rock, Internet était déjà le centre de notre foyer adolescent. Et puis, pour quelques années encore, il y avait Friends. Friends, ou l’héritage Canal Jimmy de notre oncle un peu plus cool que notre père. Cet oncle qui connaissait par coeur les répliques de Father Ted, lisait K. Dick et Bret Easton Ellis. Et avait donc accès, depuis 1994, aux moindres détails de la vie de ces six amis. Face au succès, il sera bientôt impossible d’imaginer une série mettant en scène des potes sans forcément, inévitablement, laisser échapper le nom de Friends dans le descriptif. The Big Bang Theory ? Friends chez les geeks. How I Met Your Mother ? Friends pour les nuls. Seinfeld ? Friends pour les parents.
Et puis il y avait ceci: “So no one told you life was gonna be this way / Your job's a joke, you're broke, your love life's D.O.A. / It's like you're always stuck in second gear / When it hasn't been your day, your week, your month, or even your year, but I'll be there for you (When the rain starts to pour) I'll be there for you (Like I've been there before) I'll be there for you ('Cause you're there for me too) “. Les Rembrandts, interprètes de la chanson du générique, peineront à faire face au succès. Mais jouiraient malgré tout d’une certaine aura en Indonésie, à l’heure actuelle. L’ultime anecdote d’un groupe à jamais anecdotique, pour une série qui ne l’est pas.
Des années après la fin de la série créée par Marta Kauffman et David Crane (déjà au travail sur l’excellente Dream On mais qui ne se relèveront jamais, eux non plus, après le succès de Ross, Rachel et les autres), nous irons enfin, pour la première fois, à New York. Et nous nous sentirons chez nous. Les bouches d’égoûts fument, les vendeurs de bagels vous attendent à chaque coin de rue, et les façades d’immeubles ont des escaliers de se secours. Autant de petites choses sur la ville qui ne dort jamais que nous connaissons grâce à des gens comme Martin Scorsese, et Chandler Bing. Merci à eux. Pour tout.
Nico Prat
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