Premier Contact de Denis Villeneuve : un film humain avant tout
Tout juste sorti du phénomène surprise Sicario et en attendant sa relecture de Blade Runner, Denis Villeneuve semble s'autoriser une pause et signe en apparence son film le moins personnel. En apparence seulement.Tout juste sorti du phénomène surprise Sicario et en attendant sa relecture de Blade Runner, Denis Villeneuve semble s'autoriser une pause et signe en apparence son film le moins personnel. En apparence seulement.
Premier Contact (Arrival en version originale) n'est ni le film de l'année, malgré les attentes, justifiées, des adorateurs du réalisateur d'Incendies et de Prisoners, ni une énième affaire d'invasion alien, ce que le trailer, à grands renforts de BWAAAAA (merci Inception, merci Nolan) et d'hélicoptères en action sur CNN, laissait peu subtilement penser, parce que les aliens, et les invasions, ça ramène toujours du monde dans les salles. Arrival est en réalité un film qui jamais n'abuse des effets de style inhérent au genre, et qui porte la marque de son auteur, qui, quelque soit le gigantisme de son sujet ou de son cadre, n'en oublie jamais la dimension humaine.
Arrival, c'est donc l'histoire d'Amy Adams, une experte en langues, chargée de rentrer en contact avec les extraterrestres qui ont posé leurs vaisseaux un peu partout sur la planète. Elle est aidée dans sa tâche par le rugueux Jeremy Renner, et pas vraiment aidée par les créatures qui communiquent avec des signes, comme des tâches de café, et des cris de baleine, ce qui a l'inconvénient de rendre le dialogue difficile, mais le gros avantage d'offrir un scénario au film (tiré de Story Of Your Life, livre de Ted Chiang paru en 1998 et dont le titre a valeur de petit spoiler, mais chut).
Arrival est un film humain, qui ne s'intéresse finalement que peu à la question alien, qui n'est ici qu'un prétexte, non de divertissement, mais de réflexion. Une réflexion sur la nature même de l'homme et de la femme, et ses multiples nuances, incarnées ici par Amy Adams pour son approche réfléchie et pleine de compassion, Renner, plutôt neutre, qui se laisse guider, un peu faiblement, mais joue le rôle de balancier, de conscience presque, et Whitaker, représentant d'une armée qui doute, qui fait aveu de faiblesse, et sort donc les gros bras.
Arrival est aussi et surtout un film plus important pour son sujet que pour le métrage qu'il est réellement (on a connu Villeneuve plus habité derrière la caméra, et ses personnages bien plus incarnés, chargés émotionnellement) . Comme l'écrit très bien le journaliste Alex Denney sur le non moins bon site Little White Lies, dans un article dont nous vous conseillons la lecture : "Les mots importent. C'est une phrase que nous avons entendue beaucoup ces derniers temps, car les politiciens dispersent des mots haineux comme autant de confettis. Il y a une question derrière tout cela: avons-nous tous oublié comment parler les uns avec autres? Et si oui, comment pouvons-nous apprendre à communiquer de nouveau ?". Et Arrival n'aurait pu trouver meilleure date de sortie, dans le contexte actuel.
Arrival parle de nous, de notre capacité à tout faire foirer, mais aussi, espérons le, à faire mieux demain.
Nico Prat
Sortie le 7 décembre