Club VHS : Vigilante
Vigilante (1983 - William Lustig) Par Arnaud FraisseVigilante n’est pas juste un film du samedi soir, c’est une légende de la VHS, tout comme son réalisateur, William Lustig.
Sans les films de William Lustig, la VHS du samedi serait une alternative à peine viable aux émissions d’Arthur, mais le réalisateur (qui s’est englouti des tonnes de films d’exploitation sur la 42e rue à New York dans sa jeunesse et fait ses armes sur les plateaux de films pornos) figure probablement dans le top 5 de tous les (ex)vendeurs de vidéoclubs qui ont un peu de respect pour eux-mêmes. Né dans le Bronx, Lustig a atteint ce statut culte avec ses trois premiers films : le légendaire Maniac (1980), Vigilante (1983) et Maniac Cop (1988) dont il tirera une trilogie.
Sorti peu après le deuxième volet d’Un justicier dans la ville, Vigilante aborde également le sujet de l’auto-défense en milieu urbain, bien en vogue dans les États-Unis au début des années 80. Ironie : l’une des premières expériences de plateau de Lustig a eu lieu sur le tournage du premier Death Wish (Un justicier dans la ville). Mais, malgré son côté série B / film d’exploitation, le réalisateur new-yorkais livre un film à la fois plus hardcore visuellement et plus nuancé dans son propos.
Vigilante raconte l’histoire d’un ouvrier new-yorkais dont la famille est décimée par une bande de voyous aussi bêtes que méchants. Robert Foster (vu dans Jackie Brown) se laisse entraîner dans une milice locale menée par Fred Williamson (surnommé « The Hammer ») qui entend maintenir l’ordre dans le quartier. Hésitations, armes à feu, violence… Sans vouloir spoiler, pour Robert la justice expéditive, ce n’est pas si simple…
William Lustig saisit le New York glauque des années 80 comme bien peu ont su le faire. On y est : ciel gris le jour, rues menaçantes la nuit, personnages patibulaires, musique synthétique pressurisante, la tête de Joe Spinell, des gangs de renois, latinos, blanchos aux garde-robes et coupes de cheveux flippantes… Le film ne craint pas les extrêmes et ne s’excuse de rien. Lustig oscille toujours entre l’exploitation pure et simple (avec une ligne qu’on pourrait synthétiser par « flinguons ces bâtards ») et un fond plus construit (« OK t’as un flingue, mais pour faire quoi ? »). Mais pas de panique hein, on n’est pas dans le film d’auteur non plus, plutôt dans une improbable zone de croisement entre Un justicier dans la ville et The Warriors…
Peu productif, Lustig n’a réalisé que 12 films dans sa vie, le dernier, Uncle Sam, datant de 1996. Cela ne l’a pas empêché de continuer d’œuvrer pour un cinéma aux coûts réduits, mais aux ambitions sérieuses en produisant des brouettes de films dont de nombreux documentaires courts. Depuis quelques années, il a pris la direction du label Blue Underground qui réédite et retape des films cultes des années de gloire des cinoches de la 42e rue et de la VHS. Du haut de l’Olympe des dieux du film d’exploitation, William Lustig nous contemple et pense à nous servir proprement. Vigilance ultime.
Vigilante (1983 - William Lustig)
Par Arnaud Fraisse