Club VHS : Clerks

On ne le dira jamais assez, mais il y a définitivement du génie chez Kevin Smith. Ne pas se fier à son allure de geek un peu rustre (dont il joue à mort dans Die Hard 4). Regardez plutôt cette vidéo, de plus de dix minutes, dans laquelle il explique les raisons de l’arrêt de son projet Superman. Du grand stand-up. Des punchlines et un ton digne des plus grands. Car oui, Kevin Smith est l’un des meilleurs auteurs américains. Ou du moins, il l’était dans les années 90. Les années Clerks et Mallrats. Clerks, ou Commis en folie chez nos amis québécois, jamais à une folie près. L’histoire de deux employés. Point. L’histoire d’un premier film (le deuxième en réalité, mais la première vraie sortie en salle), et d’un culte en devenir. Mais surtout, une histoire de glande et d’amitié. De vide. Le vide de la génération Cobain, celle qui trompe son ennui comme elle le peut dans cette Amérique finalement peu sexy, mais tellement cool. Nous sommes en plein dans les années grunge, et une poignée de films vont à tout jamais figer dans le temps la Génération X, et laisser un souvenir en forme de carte postale. Il y a Singles de Cameron Crowe. Et il y a donc Clerks.

Un budget ridicule (27 575 dollars) et des recettes à 3 millions. On est encore loin du phénomène de société, mais Clerks est plus que rentable, et dès le début, a ses fans. Des fans qui s’identifient à Jay (joué par Jason Mewes, qui n’aura par la suite que de rares occasions de briller sur grand écran) et de façon plus surprenante, à Silent Bob (Kevin), anti-héros parfait. Qui ne dit rien. Rien du tout. Mais, plus que de simples personnages ou une histoire, la vraie force de Smith et Mewes est d’avoir créé un univers au sein duquel évoluent leurs deux entités. Mallrats se déroule la veille de Clerks. Chasing Amy dévoile de nouveaux personnages de cet univers élargi. Dogma a lieu après les faits de la bande dessinée Chasing Dogma. Fan de comics (et auteur lui-même), Smith a bien compris l’importance qu’a pour les fans un univers élargi au sein duquel peuvent évoluer diverses entités… de comics, comme lui (mais pas uniquement). 

Clerks est un film culte, mais pas par hasard. Au-delà de ses qualités premières – drôle, décalé, mais surtout fun (un film parfait pour le samedi soir donc) – il dit beaucoup de choses sur son époque. Mais là n’est pas sa matière première. Ainsi, libre à toi, lecteur, d’adopter le niveau de lecture de ton choix. Seule chose certaine : on aimerait bien faire partie de cette bande de grands crétins. 

Clerks (Les Employés modèles – 1994) 

Par Nico Prat