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L'Art de la Hammer : "Seule une société malade peut tolérer de telles affiches"

« Seule une société malade peut tolérer de telles affiches, sans parler des films » • Derek Hill dans la revue de cinema Sight and Sound (1958-59). Cette citation ci-dessus qui ouvre le livre L’antre de la Hammer (publié aux éditions Akileos) de Ma
L'Art de la Hammer : "Seule une société malade peut tolérer de telles affiches"

« Seule une société malade peut tolérer de telles affiches, sans parler des films » • Derek Hill dans la revue de cinema Sight and Sound (1958-59). Cette citation ci-dessus qui ouvre le livre L’art de la Hammer (publié aux éditions Akileos) de Marcus Hearn, est révélatrice de son contenu. A en juger par cet ouvrage, il n’est pas difficile de comprendre comment la Hammer a gagné une telle réputation. Des femmes quasi-nues, aux vampires, assassins, psychopathes et autres momies, le seul but des affiches du studio était, semble-t-il, de séduire les impulsions les plus choquantes et primitives des spectateurs.


L’art de la Hammer s’intéresse principalement aux œuvres réalisées entre 1950 et 1979 par la société de production britannique. La majorité des affiches présentées nous viennent de Belgique, Italie, Grande-Bretagne, USA et de France. En parcourant les pages, certaines tendances apparaissent. Les posters peuvent être considérés comme des artefacts culturels – révélant sinon les pensées et les esprits des générations précédentes, puis très certainement l’interprétation et la désignation des médias sur ces questions. Dans la plupart des artworks des années 50, les femmes se retrouvent affichées [protégées] dans les bras d’un homme fort et en bonne santé. Tout autre représentation pendant cette période met en scène une femme, déshabillée, criant de terreur, à l’approche de la menace et/ou du méchant personnage.

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Les mâles protecteurs sont absents des affiches Hammer, laissant seules ces femmes terrorisées, ou, pire encore, agressés par Dieu seul sait qui. Les posters de Frankenstein s’est échappé (1957), L’Homme qui trompait la mort (1959), La Malédiction des pharaons (1959) et Le Cauchemar de Dracula (1958) étant les exemples évidents d’une telle tendance. Les monstres qui terrorisent les femmes dans ces affiches sont uniformément tous masculins.


Cependant, un changement progressif peut-être vu dans les œuvres des différents dessinateurs vers le milieu des années 60. Le poster de Un homme pour le bagne (1960) met en avant le stéréotype de la femme enlacée dans les bras d’un homme, mais au lieu de poser son visage sur la poitrine ou de regarder ce dernier avec nostalgie, cette femme semble mal à l’aise. A partir de là, les images deviennent plus minutieuses.

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Là ou autrefois les femmes arboraient des vêtements appropriés, les affichettes dessinées dans les sixties renonce quasiment à tout vêtement pour la gente féminine. Ces représentations clinquantes sont caractéristiques d’un rôle plus dominant pour la femme sur le poster – l’une des plus célèbres est sans doute Un million d’années avant J.C. (1966). Pour ceux qui ne se remémorent pas l’artwork, l’actrice Raquel Welch pose avec une lingerie type femme des cavernes avec en fond différents dinosaures – sans aucune crainte, prête à prendre les armes face à ces créatures préhistoriques et sans assistance masculine. En outre, le monstre autrefois masculin se classe dorénavant aux côtés de personnages féminins. Des posters de films tels que La Gorgone (1964), Les Maitresses de Dracula (1960), La Femme reptile (1966), Dr. Jekyll et Sister Hyde (1971) – tous les monstres femelles terrorisent sans discernement les hommes, enfants ainsi que les autres femmes.

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Outre les films de genre, L’art de la Hammer est également fascinant dans sa description d’affiches de films de guerre. Ces dernières mettent en avant des hommes musclés, soit en position de soumission face à une menace étrangère, soit solennel, la tête abattue, vaincue. L’affiche de Section d’assaut sur le Sittang (1959) est composée de deux soldats sur un contraste de noir et blanc avec en arrière-plan une forêt vierge tropicale. Les deux compères tirent inutilement sur un ennemi invisible. L’un des deux soldats semble être en train de mourir, l’autre, révolté, est au sol. Sur l’affiche de The Camp on Blood Island (1958), un soldat américain incline sa tête devant un soldat japonais, qui est prêt à le décapiter. Il existe de nombreux autres genres et tendances représentés dans L’art de la Hammer – comédie, science-fiction, roman noir – qui valent la peine d’être analysés.

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En terminant le livre de Hearn, nous ne pouvons qu’être frappé par un profond sentiment de mélancolie. Il y a tant de films dont nous ne connaissions pas l’existence. Et en regardant les noms des vedettes au-dessus des titres des affiches – les stars oubliées d’antan : Albert Lieven, Barbara Peyton, Michael Ripper, Eric Porter, Julie Ege et j’en passe - une question se pose : ces affiches sont-elles les derniers artefacts de leur existence ?  Beaucoup de films présentés dans L’art de la Hammer ne sont plus disponibles en version imprimée et/ou vidéo. Et à l’approche des fêtes de fin d’année, nous ne pouvons que vous conseiller d’ajouter sublime livre à votre liste de Noël. Avec L’art de la Hammer, vos connaissances cinématographiques seront mises à l’épreuve… et c’est une excellente chose !


Pierre Sauveton


L’art de la Hammer de Marcus Hearn disponible aux éditions Akileos (35€).