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The Hunger : L'appétit féroce de vivre

Créatures nocturnes dissimulées derrière leurs lunettes noires, Catherine Deneuve et David Bowie partent en quête de sang frais, une quête charnelle, violente, qui finira en bain de sang.
The Hunger : L'appétit féroce de vivre

Née en Égypte, il y a près de quatre mille ans, Miriam est une immortelle. Grâce au sang frais de ses victimes, elle conserve une jeunesse et une beauté inaltérables. Ces dons, elle les partage avec son compagnon, John, depuis trois siècles. Soudain, John est frappé d’un mal inconnu : un vieillissement accéléré. Pour le sauver d’une mort certaine, Miriam fait appel à Sarah, médecin spécialiste des mécanismes du vieillissement… 


Par Camille Mathieu, article paru dans notre hors-série Video Pizza,toujours disponible sur notre shop !

Adaptation du roman éponyme de l’écrivain Whitley Strieber, Les Prédateurs marque les débuts au cinéma d’un certain Tony Scott, alors tout droit venu du milieu de la publicité. Avec ce premier long-métrage, film d’horreur magnétique et pervers, le réalisateur britannique s’invite sur la croisette du Festival de Cannes, hors compétition, en 1983. Sa carrière publicitaire, Tony Scott n’en fait aucun mystère, cultivant au contraire une esthétique de papier glacé, sophistiquée en diable, aux allures vidéo-clipesques. Dans des décors de marbre froid, Catherine Deneuve, habillée par son ami Yves Saint-Laurent, apparaît en égérie alanguie d’une publicité pour parfum gothique. Lumière blafarde et faisceaux bleutés, voilages translucides ondulant doucement sous l’effet du vent, plans vaporeux : rien n’est laissé au hasard. Le cinéaste imprègne son film d’une esthétique publicitaire éthérée grâce au savoir-faire de son chef opérateur, Stephen Goldblatt.

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En salles, Les Prédateurs peine à trouver son public et la critique l’accuse de privilégier la forme au fond, lui reprochant ses excès de style. Un look new wave qui contribuera pourtant à faire des Prédateurs un film emblématique. Au sommet de cette esthétique bizarre se trouve la scène d’ouverture du nightclub où Miriam et John se faufilent, alors que le groupe Bauhaus rend un hommage à peine déguisé au vampire séculaire de Bela Lugosi. Créatures nocturnes dissimulées derrière leurs lunettes noires, Catherine Deneuve et David Bowie partent en quête de sang frais, une quête charnelle, violente, qui finira en bain de sang. 


Derrière sa mise en scène léchée, Les Prédateurs s’ancre profondément dans son époque, puisant dans les problématiques de son temps, telles que la peur du sida, l’infection, l’impuissance du monde médical et l’homosexualité, à travers la relation sensuelle qui se noue entre Miriam et Sarah…Les Prédateurs, c’est également le vertige d’un casting réunissant Susan Sarandon, David Bowie et Catherine Deneuve – dont la beauté parfaite offre toujours un contraste troublant avec les situations étranges et érotiques dans lesquelles elle s’implique (Belle de jour, La Sirène du Mississipi…). 

 

Film d’épouvante plus psychologique qu’horrifique, Les Prédateurs va tordre et réinventer le mythe du vampire. Son titre original, The Hunger, nous parle de cet appétit féroce de vivre, cette faim insatiable et dévorante de jeunesse, de beauté, de sexe et de sang, mêlant pulsions de vie et pulsions de mort. Dans son rôle de veuve noire, consumant ses amants dans sa quête terrible, Miriam se montre profondément humaine, toujours à la recherche d’un partenaire à aimer, avant de le voir périr et de jeter son dévolu sur une autre âme à chérir. C’est là le fatalisme noir des Prédateurs, le drame de l’inconstance et de la versatilité des sentiments. Rien ne peut durer toujours et comme le si bien dit la tagline du film : « nothing human loves forever. »


Par Camille Mathieu.