Avec The Warriors, Walter Hill offre une vision totalement stylisée des gangs
Combien de magnétoscopes ont été dépucelés par les Guerriers Nocturnes ? Vu le nombre de rejetons depuis 1979, on peut parier sur un gros paquet...Combien de magnétoscopes ont été dépucelés par les Guerriers Nocturnes ? Vu le nombre de rejetons depuis 1979, on peut parier sur un gros paquet...
Avec un pitch qui tient sur une simple feuille de cigarette, adapté d’un roman de Sol Yurick, Walter Hill a marqué au fer bien-bien rouge un paquet de générations, à commencer par celle qui a découvert ce film dans les vidéoclubs des années 80.
L’histoire ? Fin des années 70, dans le Bronx, une réunion de délégations des gangs de la ville part en vrille avec l’assassinat de Cyrus, leader charismatique de la plus grosse bande qui envisageait d’unifier les équipes pour tenir tout New York. On accuse les Warriors, l’équipe de Staten Island. Dépourvus d’armes, ses neuf membres doivent donc rentrer chez eux, de l’autre côté de la ville, alors que tous les gangs sont à leur poursuite.
À la fois daté et impérissable, Les Guerriers de la nuit a inspiré un paquet de copies plus ou moins pâles, plus ou moins italiennes, qui ont fait les belles heures des vidéoclubs comme Les Guerriers du Bronx d’Enzo Castellari, qui a ajouté des éléments de New York 1997 pour faire bonne mesure.
Mais ce film n’est pas simplement un film, c’est le premier beat them all. The Warriors développe une trame de jeu vidéo : les mecs courent, ils se battent. Ils courent, ils se battent. Ils prennent le métro, ils se battent… À chaque fois, les gangs sont plus forts ou plus rusés… Bref quand tu jouais à Double Dragon, tu pensais aux Warriors, quand tu jouais à Renegade, tu pensais aux Warriors…
Malgré une histoire linéaire et simpliste et des acteurs quasi inconnus (excepté Michael Beck et encore…), le film de Walter Hill a marqué son époque et reste toujours aussi magique.
Tourné entièrement de nuit, The Warriors offre une vision totalement stylisée des gangs qui a largement participé à cultiver l’aura du film : même si dans le New York lugubre de l’époque, les bandes portaient réellement des « uniformes » urbains, ici les Reefs sont en kimono, les Furies déambulent maquillés avec battes et tenues de baseball et les Warriors ont des petits gilets en cuir sans manche du plus bel effet.
Toutes furieuses, les scènes de baston sont inventives et ne se ressemblent jamais, New York devient un gigantesque parcours du combattant, la musique synthétique et la musique funky de Barry De Vorzon est hypnotique et le tout est haletant jusqu’au face off final…
Bien avant les griffonnages de Frank Miller et les bidouillages de Zack Snyder, Hill envisageait The Warriors comme une relecture contemporaine de la bataille des Thermopyles, une vision qu’il appuie encore plus sur son director’s cut augmenté d’inserts pas très heureux de pages de comic books… Mais on s’en fout : même si le transfert en Blu-Ray est superbe, le film se regarde dans les conditions d’origine, en VHS ou DVD crado, limite en VF même si la VO est culte avec ses fameux « Can yooooou dig iiiiit ? », « The chicks are packed ! The chicks are packed ! » ou « Warreeeeeeors, come out and plaaaay ! » qu’on retrouve sur un paquet de disques de rap américains.
Unique, graphique, ancré dans les fantasmes de violence de son époque, maîtrisé et totalement jouissif, The Warriors est l’équivalent de la première pipe de crack pour les accros de la VHS : les films d’après, c’était juste pour retrouver l’effet de la première dose.
Arnaud FRAISSE