DAFT PUNK - Merci pour le voyage.
La fin programmée des Daft Punk résonne douloureusement. Après les morts de quelques icônes irremplaçables qui jalonnèrent notre existence (Bowie, Prince, Cohen, Christophe, Morricone...) et façonnèrent nos goûts musicaux, le départ d'un groupe en ac
La fin programmée des Daft Punk résonne douloureusement. Après les morts de quelques icônes irremplaçables qui jalonnèrent notre existence (Bowie, Prince, Cohen, Christophe, Morricone...) et façonnèrent nos goûts musicaux, le départ d'un groupe en activité est encore plus dur à supporter. Parce qu'il y avait encore des choses à faire, des murs à franchir, des barrières à exploser.
En s'offrant la liberté derrière l'anonymat, le groupe avait non seulement construit le plus beau projet marketing de l'histoire de la musique moderne, mais s'était surtout offert le luxe de toujours faire selon ses envies. Sans respect des modes, des codes ou des conventions. La mode c'est désormais eux qui l'imposent. Les autres suivront, avec souvent un temps et beaucoup de talent de retard. Comme Bowie, le duo ingurgite des dizaines d'influences, sample allègrement, mais toujours pour en faire un titre de Daft Punk, avec une efficacité redoutable pour les oreilles comme pour les pieds. Même le freluquet Human After All, accueilli comme une blague ou un gros fuck après le carton Discovery, prendra toute sa dimension une fois incrusté parmi les tubes lors du fameux tour 2007. Celui qui mettra toute la concurrence électro à la retraite. Que faire après ça quand on est monté si haut dans son domaine ? En sortir. Après une BOF (réussie, malgré les pisse froids et les contraintes Disney) pour Tron Legacy, le duo s'entoure de musiciens pour une aventure organique mettant du funk sur leurs influences pop californiennes. N'en déplaise aux extrémistes techno, l'album est un trip musical vibrant et euphorisant, qui laissera là aussi la concurrence exsangue. Un 3e classique en 4 albums... On annonçait depuis les Daft en studio, sur les bof du nouveau Tron, du prochain Dario Argento, des ressorties de Lp étaient annoncées pour Mars. En 8 ans d'absence on ne peut que penser qu'il y a du matériel inédit quelque part, et que cette annonce ne peut rester qu'un teaser d'un film déjà sorti...Mais comme le dit si bien Martin Fourcade, il vaut mieux partir quand on est tout en haut... Quitte à laisser la musique électro aux mains de DJ Snake ou de Petit Biscuit...
En 20 ans dans le monde de la musique, mon plus beau souvenir, je le leur dois, parce que j'y repense encore souvent et que seule la musique a ce pouvoir de transporter l'âme et les sens : en septembre 2000, alors que je suis chez Virgin depuis 3 mois, le séminaire d'été à Porticcio prend une tournure hollywoodienne, quand le soir, sous les étoiles corses, nous écoutons alors ce qui sera le 2e album des Daft : Discovery. La claque est monumentale, le plaisir insondable. Get lucky ! Surtout que le groupe est là, sans casque, répondant aux questions et aux pourquoi... Humains avant tout. L'album ne sortira que 6 mois plus tard, les clips, Matsumoto, tout ça...
Dans une industrie de plus en plus terne et frileuse, le groupe aura toujours fait figure de courage et de choix pertinents avec une exigence artistique et une signature sonore unique. Dans une année 2021 déjà passablement pourrie niveau musical, cette annonce laisse un vide incommensurable et la sensation amère que les derniers guides ont tous quitté le navire. Et qu'on va devoir ramer un peu plus.
Merci pour le voyage.
Texte écrit par Antoine MELVIL (@toiletteintime)
