et si : les films abandonnés de John Carpenter
John Carpenter fut, pour bon nombre de projets plus ou moins avancés, un temps envisagé, annoncé, attaché, ou tout simplement fantasmé dans le fauteuil du réalisateur.Au fil d’une carrière s’étalant sur plus de cinquante ans – en 1968, alors âgé de seulement vingt ans, il déménage à Los Angeles et s’inscrit à la prestigieuse université du sud de la Californie pour apprendre à faire des films –, John Carpenter fut, pour bon nombre de projets plus ou moins avancés, un temps envisagé, annoncé, attaché, ou tout simplement fantasmé dans le fauteuil du réalisateur. Petit passage en revue, forcément non exhaustif, de ce qui aurait pu être…
Par Nico Prat.
Retrouvez notre nouveau livre dédié à Big John en librairie et sur notre shop !
Meltdown
Voilà peut-être le premier d’une très longue liste de projets d’envergure qui ne verront jamais le jour, malgré la présence du nom de Carpenter au générique. Certes, nous sommes en 1977, un an donc avant la sortie d’Halloween, et Carpenter est alors autant une star en devenir qu’un scénariste discret. Meltdown, tout d’abord nommé The Prometheus Crisis, devait être un film d’horreur prenant place dans une centrale nucléaire sur le point d’exploser. Le projet, annoncé un temps sur grand écran avec Dolph Lundgren en haut de l’affiche, sera finalement une arlésienne. En juin 1994, un tournage est même planifié avec John Dahl (responsable de Kill Me Again, un thriller néo-noir avec Val Kilmer) derrière la caméra. En vain. Le film n’a toujours pas vu le jour.
Firestarter
Bien avant que John Carpenter adapte l'œuvre de Stephen King avec Christine, il fut en 1981 attaché à l’adaptation du roman Firestarter de l’écrivain, l’histoire d’une petite fille, dotée du pouvoir de pyrokinésie, et de son père, tous deux poursuivis par une agence gouvernementale. Carpenter est alors en plein tournage de son futur chef-d'œuvre, The Thing, mais, intéressé, il prend le temps d’embaucher au scénario Bill Lancaster (The Thing, mais aussi The Bad News Bears de Michael Ritchie, sorti en 1976) et Bill Phillips (plus tard au travail sur Christine justement), et même de penser à un casting : il veut Richard Dreyfuss dans le rôle du père, et Burt Lancaster en militaire obstiné. L’échec de The Thing à sa sortie en salles annule les espoirs de Carpenter, et Firestarter sera finalement mis en scène par Mark L. Lester en 1984, avec Drew Barrymore.
The Ninja
The Ninja, roman paru en 1980, raconte, dans un Japon traumatisé par l’issue toute récente de la Seconde Guerre mondiale, le parcours de Nicholas Linnear, sino-anglais pratiquant les arts martiaux. C’est un polar, c’est un roman horrifique par moments, c’est une histoire de combats, de mafia. C’est un roman dense, riche, ce qui explique peut-être l’échec de son adaptation au cinéma, un premier temps par Irvin Kershner, puis par son remplaçant, John Carpenter, qui devait en signer le script avec son complice Tommy Lee Wallace. Il est permis de penser qu’il y a un peu de The Ninja dans les aventures de Jack Burton (et un peu de The Golden Child aussi, autre film qui lui fut proposé), ainsi qu’un petit parfum de revanche pour le réalisateur, envers les producteurs Richard D. Zanuck et David Brown.
Top Gun
Et si ? On se pose souvent la question, ici pour un film qui ne verra jamais le jour, là pour un autre qui aurait, selon nous, mérité un autre réalisateur ou une autre star. Et si… John Carpenter avait réalisé Top Gun ? Improbable, mais vrai, le projet lui fut proposé en 1985, mais il le refusa assez nettement, affirmant que combattre l’Union soviétique lors du troisième acte ne rendrait pas service aux relations internationales déjà hostiles en temps de guerre froide. Et, comme Carpenter lui-même, difficile pour nous de voir ce qu’il aurait pu apporter au projet : des soldats kamikazes, peut-être ?
Halloween 4 et Halloween H20
On le sait, Carpenter, c’est Halloween, et s’il ne repassa jamais derrière la caméra pour en réaliser la moindre suite, il fut souvent convoqué comme producteur, titre purement honorifique et destiné à rassurer les fans sur la pertinence du projet. Tout d’abord pour le quatrième volet de la franchise. Après le relatif échec du troisième épisode, qui ne mettait pas en scène Michael Myers, Carpenter souhaite pourtant poursuivre dans cette voie et embauche Dennis Etchison (responsable des novélisations d’Halloween II et III), et pense même à Joe Dante pour la mise en scène. Mais le scénario est rejeté par le producteur Moustapha Akkad qui le juge trop cérébral, et peu après, la productrice Debra Hill et Big John vendent les droits de la franchise à ce même Akkad, un deal n’incluant par le script achevé. Carpenter se détache alors définitivement (pense-t-il) de la saga, et le quatrième volet est finalement réalisé par Dwight H. Little. En 1998, vingt ans donc après la sortie du premier film, Jamie Lee Curtis tente de convaincre l’homme qui l’a révélé de mettre en scène un nouveau carnage, et ce dernier accepte, mais demande un cachet mirobolant, selon lui pour palier aux multiples royalties qu’il n’aurait jamais touchées au fil des ans. Akkad, toujours propriétaire de Michael Myers, refuse, et Carpenter une nouvelle fois, va voir ailleurs.
Shadow Company
En 1988, un an après avoir refusé de réaliser Liaison Fatale, Carpenter s’attèle sérieusement à un nouveau projet pour le moins excitant : Shadow Company. Un film d’action et d’horreur, avec Shane Black au scénario, Kurt Russell dans le premier rôle, et Walter Hill dans le fauteuil du producteur. L’histoire ? Celle d’un groupe de soldats des forces spéciales américaines morts pendant la guerre du Vietnam qui, des années plus tard, après que leurs corps ont été ramenés au pays, s’extraient de leurs tombes, attaquent une armurerie, puis la ville voisine, tuant tout le monde la nuit de Noël. Shadow Company ne verra jamais le jour, mais avouez qu’il y avait de bonnes raisons de rêver au meilleur.
L’Exorciste III
En 1989, Carpenter se voit offrir sur un plateau la mise en scène du troisième volet de L’Exorciste, et rencontre l'auteur du roman originel et du scénario du chef-d'œuvre de Friedkin, William Peter Blatty. Ils passent une semaine ensemble, le temps de mettre sur page quelques idées, mais bien rapidement, des différends surgissent, entre autres sur le climax du film. Malgré le respect qui les unit, Carpenter préfère quitter le projet, et Blatty lui-même se chargera de la réalisation du film. Une réussite.
Vampires II
Malgré le succès de Vampires en 1998, et malgré la présence dans son contrat d’une clause lui assurant la réalisation d’une suite, la faillite du producteur largo Entertainment enterre un temps les envies de Carpenter. Pourtant, quelques mois plus tard, alors que les droits sont revenus à Columbia Pictures, Carpenter est rappelé au poste de réalisateur, ce qu’il accepte immédiatement. Mais les mathématiques peuvent être cruelles. Ainsi, malgré un joli score en salles, c’est bel et bien sur le marché de la vidéo que Vampires a le mieux fonctionné. Dès lors, le studio opte pour un direct to video, ce que Carpenter refuse tout net quittant dès lors le projet. Il sera seulement producteur exécutif sur Vampires: Los Muertos en 2002, écrit et réalisé par Tommy Lee Wallace. Et avec Jon Bon Jovi au casting.
Mais aussi
Une suite de Ghosts Of Mars (le film se termine sur un cliffhanger), Evolution (avant que le projet ne devienne une pure comédie avec Ivan Reitman derrière la caméra), un spin-off en anime de Escape from New York, un remake de Godzilla (ici, plutôt à la demande de Carpenter lui-même, l’idée ne mena jamais bien loin), un remake de Creature from the Black Lagoon, Tombstone (finalement mis en scène par George P. Cosmatos avec Kurt Russell), ou encore Armed And Dangerous (où il sera une nouvelle fois remplacé par Mark L. Lester).