Guillermo Del Toro’s Couch Gag
Il est parfois des collaborations qui paraissent si évidentes qu’on se demande pourquoi elles n’ont pas eu lieu plus tôt. Del Toro sur Les Simpson pour un Treehouse, c’est limpide.On en parle longuement dans le numéro sept du magazine Rockyrama : l’une des particularités des Simpson, c’est l’institutionnel couch gag, cette blague de fin de générique qui va croissant dans le délire au fil des saisons et des épisodes. Autre tradition simpsonienne : les annuels Treehouse of Horror. Ces épisodes, conçus comme autant d’odes à toutes les facettes du cinéma de genre à travers les âges, sont spécialement réalisés pour célébrer Halloween. Ils sont souvent attendus avec impatience par les fans, toujours curieux de découvrir le nouveau cru. Et comme chaque rendez-vous annuel, il y a des années plus glorieuses que d’autres. Lorsque le 6 octobre 2013 est diffusé le Treehouse of Horror XXIV (on est alors au 532e épisode de la série, coco, qu’est-ce que tu dis de ça, hein !?) on se dit que le millésime s’annonce fameux. Et c’est le cas, en grande partie grâce à l’affolant générique/couch gag réalisé par Guillermo del Toro !
Article par Joe Hume, à retrouver dans le Rockyrama 16 : Guillermo Del Toro, King of Monsters.
Il est parfois des collaborations qui paraissent si évidentes qu’on se demande pourquoi elles n’ont pas eu lieu plus tôt. Del Toro sur Les Simpson pour un Treehouse, c’est limpide. Depuis sa création, la série de Matt Groening se plaît à glisser dans chacun de ses épisodes des clins d’œil au septième art. C’est devenu l’objet d’une véritable chasse au trésor pour les amateurs qui s’échinent à dénicher, compiler et archiver la moindre référence. Avec le temps, Les Simpson sont devenus tout aussi cultes que les films auxquels ils rendent hommage, il était donc logique et amplement temps qu’un cinéaste omnivore ne vienne à son tour apporter sa pierre à l’édifice. Si des artistes issus de l’animation tels que Bill Plympton ou Sylvain Chomet s’étaient déjà prêtés au jeu, on notait que peu ou pas de réalisateurs n’étaient encore passés par la case Simpson (sauf pour prêter leur voix à leur propre personnage et invité, mais c’est une autre affaire). Jamais un Tarantino, un Kevin Smith, un Scorsese pour se prêter au jeu. Étonnant. Il faut attendre la saison 25 pour voir débarquer Guillermo del Toro à la barre d’un épisode (plus précisément du générique). Et au vu du résultat final, on peut comprendre pourquoi le réalisateur mexicain dit s’être autant écarté.
Le couch gag de del Toro est à l’image de la filmographie du personnage : généreuse, haute en couleurs, virtuose et barbée de références savoureuses. Guillermo del Toro, ce n’est un secret pour personne, est un cinéphile avant d’être un cinéaste. Se retrouver à la tête d’un projet dans lequel il peut s’en donner à cœur joie et citer toutes ses obsessions pop personnelles lui paraît très excitant. De ses propres mots, ce générique est une véritable lettre d’amour aux Simpson et au cinéma qu’il chérit. Le réalisateur va ainsi glisser, en à peine trois minutes, des dizaines de références au cinéma de genre, qu’il va télescoper avec l’univers des Simpson mais aussi avec ses propres films. On assiste donc à l’émergence du panthéon personnel de del Toro : Ray Harryhausen, les zombies, les kaiju, Hitchcock, Stephen King, Lovecraft, Phantom Of The Paradise, Edgar Poe, Roger Corman, les Universal Monsters, Nosferatu, La Mouche, Lewis Carroll, Stuart Gordon, Hot Fuzz, Alien, Cronenberg, etc. Au sein de cette montagne d’hommages, il s’amuse à inclure des références à sa propre filmographie. De Pacific Rim à Hellboy, en passant par Blade, Le Labyrinthe de Pan, ou les plus obscurs Mimic et Cronos, tout y passe. Cela dit, le véritable tour de force n’est pas dans la citation, il est dans cette aisance avec laquelle del Toro unifie l’ensemble et l’adapte à la série qu’il est venu servir : Les Simpson. Comme souvent pour ce genre d’exercices jubilatoires et foutraques, on aurait aimé que le moment se prolonge. Un épisode entier centré sur ce couch gag, on était preneurs. Mais on devra se contenter de ces trois minutes.
Avec ce couch gag exceptionnel, Guillermo del Toro se saisit d’un générique ultra-culte, connu dans ses moindres détails par des armées de fans à travers le monde, et lui appose sa patte. Il le fait avec style, humilité et bonheur, des caractéristiques qui se manifestent également dans sa carrière cinématographique. Il était attendu au tournant et, aux dires des amateurs de longue date, son couch gag était ce qu’il pouvait arriver de mieux à la série. On n’ira peut-être pas aussi loin mais admettons que le travail de del Toro sur cette ouverture spéciale nous aura sacrément donné envie de nous replonger dans ces œuvres fondatrices du cinéma de genre tel qu’on le connaît aujourd’hui.
Article par Joe Hume, à retrouver dans le Rockyrama 16 : Guillermo Del Toro, King of Monsters.