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Zack Snyder, roi du porn

Difficile de passer à côté des mauvaises, voir très mauvaises critiques du dernier film de Zack Snyder: elles sont légion, et Internet ne semble parler que de cela. Ici-même, hier, nous laissions d’ailleurs la parole à deux déçus de Batman v. Superma
Zack Snyder, roi du porn

Difficile de passer à côté des mauvaises, voir très mauvaises critiques du dernier film de Zack Snyder: elles sont légion, et Internet ne semble parler que de cela.


Ici-même, hier, nous laissions d’ailleurs la parole à deux déçus de Batman v. Superman. Déception, abérration pour certains… Mais récréation pour d’autres. Face à une presse unanime, et compte tenu de l’importance du film (pour DC, pour les super-héros, et peut-être même pour Hollywood en général), il nous semblait légitime d’offrir un autre point de vue. Positif celui-là. Ou presque.


Ne faisons pas semblant de découvrir de quoi est capable Zack Snyder, l’intégralité de sa filmographie reflète sa marque de fabrique: le mec s’en bat les couilles. De tout, et surtout de vous. Réussir contre toute attente le remake d’un film de zombies culte et prendre à revers les fanboys ? Fait. Réaliser un film d’animation avec des chouettes ? Oui. Adapter Watchmen et 300 ? Ok. Coucher sur pellicule ses fantasmes adolescents les plus inavouables ? Sucker Punch mesdames et messieurs ! Snyder se moque bien des risques, de la pression populaire, des scores au box-office (le bide de Sucker Punch ne l’a pas empêché de se voir confier le retour de Superman sur grand écran), et de façon générale, du bon goût. Retenez bien ceci les enfants, les lecteurs de comics, les cinéphiles et les financiers: Zack Snyder s’en bat les couilles.

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Mais cela ne l’empêche pas d’aimer son sujet, ses personnages, parfois de façon maladroite. Cet amour, malgré le bordel, crève l’écran dans Batman v. Superman. Et à vouloir donner à chacun de ses acteurs la place qu’ils méritent, c’est un trop-plein qui nous détruit la tête, les oreilles, les yeux, tout. Oui, le film est raté, au mieux. On ne comprend plus grand chose après une heure, tout est gris, tout est sombre (mais un film avec un mec en collants n’est pas supposé rappeler à tout prix l’univers des Télétubbies), Amy Adams ne sert à rien (si ce n’est à jeter en permanence de façon risible la dernière cartouche de Kryptonite disponible), Henry Cavill fait les gros yeux, les cauchemars de Bruce Wayne n’ont ni queue ni tête… N’en jetez plus ? Si. Jetons par-dessus ce torrent de boue une bonne dose d’amour Bisounours. On aime Zack Snyder, Ben Affleck, Wonder Woman et Jesse Eisenberg. Défendons les.


Ben Affleck est un bon Batman, badass, cool, violent, terrifiant parfois (sa première apparition particulièrement). Le regard de l'homme, par le passé brisé, laissé pour mort, moque (on parle de Wayne ici, mais nous pourrions tout aussi bien parler d'Affleck lui-même) laisse imaginer beaucoup de choses. Une souffrance réelle. Une fatigue. L’acteur s’est de toute évidence impliqué dans le rôle, ce que la caméra de Snyder ne manque pas de nous rappeler à grands renforts de gros plans sur les bras, les jambes, le ventre… Peu de subtilité ici, mais une mise en scène MTV un peu datée à grands renforts de chair et de peau. Il en était de même dans Man Of Steel, difficile donc de s’étonner ici de la propension de Snyder à tout tourner en compétition de Tekken. Son style est ainsi fait. Car oui, il y a du style chez cet homme. Sorte de Michael Bay du ghetto, Snyder n’est pas, contrairement à ce que beaucoup pourraient croire, un infâme Yes Man comme John Moore ou Alan Taylor. Il décide, il a du pouvoir. Et devant la caméra, cela se voit. Batman v. Superman est un film pour le moins musclé. Dans lequel s’affrontent donc Batman, Superman (si le Cavill de Man Of Steel ne vous a pas plus, il en sera de même ici - mais l’auteur de ces lignes défend Man Of Steel), mais également Wonder Woman (Gal Gadot, plutôt une bonne surprise, sexy et mystérieuse), Doomsday (qui n’a rien à faire là, ok) et Lex Luthor. Un Lex interprété par Jesse Eisenberg, qui s’en donne à coeur joie dans le cabotinage. Too much ? Pour certains, oui. Mais force est de constater qu’il n’en fait pas plus que Gene Hackman et Kevin Spacey en leur temps. Luthor est psychotique, a les moyens de sa folie, et l’acteur de The Social Network et du trop sous-estimé American Ultra le joue comme il se doit.

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Difficile cependant de dire du bien en toute objectivité de la dernière heure, qui doit à la fois voir nos héros s’affronter, combattre un super vilain, introduire la Justice League, sauver Gotham (ou Metropolis ? On ne sait plus trop où nous sommes). Une vraie recette d’Epic Meal Time. C’est mal monté, visuellement souvent brouillon. Mais le choc des titans a bien lieu, la confrontation entre Batman et Superman, tant attendue, est réussie, exception faite de son dénouement un brin ridicule. Un ridicule qui ici ne tue pas, contrairement à la volonté, le devoir même, d’en faire trop. Introduire la Justice League ? Là encore, point de finesse, tout comme le thème attribué à chaque apparition de Wonder Woman, un énorme riff de guitare qui tâche, accompagné de tambours étourdissants. Mais merde, c’est fun ! C’est gras, c’est obèse. C’est involontairement drôle par moments. Et ça, c’est Snyder.

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Batman v. Superman regorge de bonnes choses, d’excellentes surprises, mais aussi, malheureusement, de véritables échecs, pointés du doigt, à juste titre, par les critiques. Mais rappelons que ce trop-plein n’est pas propre au réalisateur de 300: le Dark Knight Rises de Nolan souffrait lui aussi de faire partie d’une saga trop grande pour lui. Là où Nolan peinait à conclure, Snyder, lui, s’avère maladroit sur son introduction. Et pourtant, il a réussi son Watchmen, une oeuvre narrative extrêmement complexe et riche. Aucune raison donc de s’alarmer concernant le futur film consacré à la Justice League. Batman v. Superman n’est pas le pire des Batman (il y en a deux avant lui, vous savez lesquels), ni le pire Superman (là aussi vous savez), et jusqu’à preuve du contraire, il s’agit du meilleur film avec Wonder Woman. Snyder y fait du Snyder. C’est Lui, c’est Son Film. Et si nous sommes fascinés par les destins tragiques, les grands échecs, les déceptions, aucune raison de ne pas l’être également devant un adulte de 50 ans au coeur de grand gamin à qui l’on donne des millions de dollars pour faire joujou. Batman v. Superman, c’est cela. Du Destruction Porn. Un gros jouet. Libre à vous de le casser, ou de reprendre de la chantilly.


Nico Prat


Batman V. Superman - Au cinéma